Contrairement à tous ses collègues, Il était très heureux de revenir au monde des études.
De son siége d’autobus il observait Tunis : des gens qui allaient et venaient, certains très pressés, d’autres l’étaient moins et la bas contre un mur, un groupe de jeunes se tenaient matant une belle fille qui passait !
« Quelle sont belles les filles de Tunis, au bled il n’y a pas d’aussi jolies filles… ce n’est pas parce que ici les filles sont meilleures mais tout simplement parce qu’ici les femmes prennent beaucoup soin de leur apparence alors que chez nous dés leurs naissances ou elles sont coquettes et donc belles ou elles ne le sont pas … Il n’y a pas de corrections possibles ! »
« Ah Tunis, ses femmes, son métro, ses cafés, et les cours à l’école ». Il adorait ce qu’il faisait, il jubilait dans la salle de classe, c’est toute la vie d’étudiant qu’il adore. Ses plus beaux souvenirs étaient liés à cette vie là, la vie de camaraderie étudiante, la vie au foyer universitaire.
Quand il a débarqué, il ne connaissait personne même pas son collègue de chambre mais ça ne l’ennuyait pas, il était déterminé ! Il voulait avoir un statut dans cette société et il n’y avait pas plus court chemin que d’avoir un diplôme universitaire.
Il se souvient aussi comment beaucoup d’étudiants à la vue de l’état des chambres et de la nourriture au restaurant universitaire ont déclaré forfait ! « C’est des gosses de riches, ils ne peuvent même pas être responsables d’eux même ! Comment veux tu qu’ils aient le gout du sacrifice ?»
« Sacrifices », voila un mot qu’il connaissait de très prêt : depuis des années il ne mangeait jamais à plein ventre pour laisser plus de nourriture à ses plus jeunes fréres et sœurs. Et contrairement à tous ceux qui n’arretait pas de raler au restaurant universitaire, lui ne disait rien, au contraire, il a sympatisé avec les gens qui y travaille et a pu décrocher un travail la bas en échange de repas gratuits et quelques petits sous.
Le bus s’arrêta à la gare, il est sorti. « Me voilà Tunis ! » Il se disait tout en prenant une bouffée d’air assez polluée par la fumée de l’autobus.
Pour les autres étudiants les vacances viennent de s’achever. Pour lui, c’est les problèmes qui viennent de se terminer : il a six frères et sœurs moins âgés que lui et donc ni la piètre retraite que touche son vieux père ni le pain que sa mère cuisine et vend ne suffisent pour couvrir les besoins de la famille c’est pourquoi dés qu’il termine ses études il doit passer au travail de maçonnerie.
« 258 dinars ! » C’est la somme qu’il a pu recueillir de son travail, il a laissé 200 dinars pour aider sa famille et a consacré pour lui-même 58 dinars.
Il en a déjà dépensé 12 dinars pour le ticket de bus et il va verser 40 dinars pour le loyer trimestriel d’une chambre universitaire donc il lui reste exactement 6 dinars !
« 6 dinars ! » Il a sourit en le disant et marchant dans les rues de Tunis. « Donc il faut que je fasse avec cette minuscule somme pour au moins deux mois puisque la bourse ne sera pas versée plutôt ! ».
Dans son sourire il y avait un peu d’ironie mais aussi beaucoup de confiance, il savait que ses amis ne le laisseront pas tomber. Avec le temps qu’il a passé avec eux, ils sont devenus des vrais frères. Et puis il pourra travailler dans le restaurant comme il l’a fait l’année dernière et ainsi il mangera gratuitement même s’il sera contraint de rater quelques cours !
L’année dernière il avait quelques lacunes à cause de son travail au restaurant, mais en bossant dur il n’a été recalé sur aucune matière ! Le voilà donc à la deuxième année et il ne lui restait qu’une autre année pour décrocher le diplôme !
S’approchant du foyer, son cœur commençait à battre, « qu’est ce que je me suis amusé ici ! . Des centaines de souvenirs ont refait surface dans sa tête, les fou rires, les parties de belote très tard le soir, les farces, les paris …
Il est même tombé amoureux d’une étudiante qui venait de la même ville que son colocataire et qui apparemment avait les mêmes sentiments pour lui.
« Dans ce pays, aimer est une affaire de richard ! » Il répétait avec un sourire amer à ses amis qui le poussaient à faire le premier pas vers elle.
Il aurait aimé sortir avec cette fille, mais sortir signifie forcement des repas dehors, des billets de cinéma, des taxis à payer et tout cela était au-dessus de ses moyens !
Pour se consoler, il disait que les affaires du cœur ne feront que l’éloigner de son but ultime et pourrons affecter ses moyennes mais au fonds, son cœur avait tout un autre avis sur la question.
« C’est sûr ! Quand la bourse viendra, je garderais pour moi 30 ou 50 dinars, et je sortirais au moins une fois avec elle ! »
Il disait cela parce que d’habitude dés que la bourse est là il garde pour lui l’argent avec lequel il paiera le loyer du futur trimestre, il laisse pour lui-même une somme minuscule et puis il envoie tout le reste à sa famille.
Entrant dans le foyer il commençait à scruter les silhouettes espérant trouver ses camarades mais il n’a aperçu que des nouveaux visages, il y avait même de très jolies filles !
Il savait que la plupart des étudiants ont déjà eu leurs chambres et c’est justement pour éviter les bousculades qu’il est venu l’après midi !
« Je suis sûr que les gars ont réservé pour moi ! » De toute façon ça ne l’ennuyait pas du tout de se retrouver avec quelqu'un d’inconnu, ça lui permettra de connaître d’autres gens et même s’il ne s’entend pas avec ce colocataire il pourrait permuter avec un autre étudiant !
- Bonjour monsieur !
- oui bonjour …
- Je viens pour avoir une chambre.
- Tu es de la deuxième année toi !
- oui exactement …
- Et bien les étudiants de la deuxième année n’ont plus droit au foyer !
- Comment …? mais …
- On a déjà du mal à placer tous ceux qui sont à la première année !
Il était tellement sous le choque qu’il ne pouvait pratiquement plus tenir sur ses jambes, il s’apprêtait à sortir puis il est revenu, hésitant, le visage tout pâle, ne pouvant presque plus articuler.
- monsieur s’il vous plait …je n’ai pas d’argent pour louer une maison
- désolé !
- Je vous en supplie monsieur aillez pitié !
- Mais je ne peux vraiment rien faire ! … n’es tu pas boursier ?
- Si.. Mais je ne touche la bourse que dans deux ou trois mois !
- Qu’est ce que tu veux… C’est la vie !
- Je veux simplement avoir une vie comme les autres, je veux étudier avoir un boulot … je vous en supplie ! je n’ai pas les moyens de continuer mes études hors du foyer
- C’est une décision du ministère… sincèrement désolé !
Il s’est accroché aux murs pour ne pas tomber, s’est assis prés de la porte du foyer, s’est tenu la tête avec ses mains et a commencé à pleurer à chaudes larmes tout en pleurnichant :
- Tout ce que je veux c’est étudier et réussir !
De son siége d’autobus il observait Tunis : des gens qui allaient et venaient, certains très pressés, d’autres l’étaient moins et la bas contre un mur, un groupe de jeunes se tenaient matant une belle fille qui passait !
« Quelle sont belles les filles de Tunis, au bled il n’y a pas d’aussi jolies filles… ce n’est pas parce que ici les filles sont meilleures mais tout simplement parce qu’ici les femmes prennent beaucoup soin de leur apparence alors que chez nous dés leurs naissances ou elles sont coquettes et donc belles ou elles ne le sont pas … Il n’y a pas de corrections possibles ! »
« Ah Tunis, ses femmes, son métro, ses cafés, et les cours à l’école ». Il adorait ce qu’il faisait, il jubilait dans la salle de classe, c’est toute la vie d’étudiant qu’il adore. Ses plus beaux souvenirs étaient liés à cette vie là, la vie de camaraderie étudiante, la vie au foyer universitaire.
Quand il a débarqué, il ne connaissait personne même pas son collègue de chambre mais ça ne l’ennuyait pas, il était déterminé ! Il voulait avoir un statut dans cette société et il n’y avait pas plus court chemin que d’avoir un diplôme universitaire.
Il se souvient aussi comment beaucoup d’étudiants à la vue de l’état des chambres et de la nourriture au restaurant universitaire ont déclaré forfait ! « C’est des gosses de riches, ils ne peuvent même pas être responsables d’eux même ! Comment veux tu qu’ils aient le gout du sacrifice ?»
« Sacrifices », voila un mot qu’il connaissait de très prêt : depuis des années il ne mangeait jamais à plein ventre pour laisser plus de nourriture à ses plus jeunes fréres et sœurs. Et contrairement à tous ceux qui n’arretait pas de raler au restaurant universitaire, lui ne disait rien, au contraire, il a sympatisé avec les gens qui y travaille et a pu décrocher un travail la bas en échange de repas gratuits et quelques petits sous.
Le bus s’arrêta à la gare, il est sorti. « Me voilà Tunis ! » Il se disait tout en prenant une bouffée d’air assez polluée par la fumée de l’autobus.
Pour les autres étudiants les vacances viennent de s’achever. Pour lui, c’est les problèmes qui viennent de se terminer : il a six frères et sœurs moins âgés que lui et donc ni la piètre retraite que touche son vieux père ni le pain que sa mère cuisine et vend ne suffisent pour couvrir les besoins de la famille c’est pourquoi dés qu’il termine ses études il doit passer au travail de maçonnerie.
« 258 dinars ! » C’est la somme qu’il a pu recueillir de son travail, il a laissé 200 dinars pour aider sa famille et a consacré pour lui-même 58 dinars.
Il en a déjà dépensé 12 dinars pour le ticket de bus et il va verser 40 dinars pour le loyer trimestriel d’une chambre universitaire donc il lui reste exactement 6 dinars !
« 6 dinars ! » Il a sourit en le disant et marchant dans les rues de Tunis. « Donc il faut que je fasse avec cette minuscule somme pour au moins deux mois puisque la bourse ne sera pas versée plutôt ! ».
Dans son sourire il y avait un peu d’ironie mais aussi beaucoup de confiance, il savait que ses amis ne le laisseront pas tomber. Avec le temps qu’il a passé avec eux, ils sont devenus des vrais frères. Et puis il pourra travailler dans le restaurant comme il l’a fait l’année dernière et ainsi il mangera gratuitement même s’il sera contraint de rater quelques cours !
L’année dernière il avait quelques lacunes à cause de son travail au restaurant, mais en bossant dur il n’a été recalé sur aucune matière ! Le voilà donc à la deuxième année et il ne lui restait qu’une autre année pour décrocher le diplôme !
S’approchant du foyer, son cœur commençait à battre, « qu’est ce que je me suis amusé ici ! . Des centaines de souvenirs ont refait surface dans sa tête, les fou rires, les parties de belote très tard le soir, les farces, les paris …
Il est même tombé amoureux d’une étudiante qui venait de la même ville que son colocataire et qui apparemment avait les mêmes sentiments pour lui.
« Dans ce pays, aimer est une affaire de richard ! » Il répétait avec un sourire amer à ses amis qui le poussaient à faire le premier pas vers elle.
Il aurait aimé sortir avec cette fille, mais sortir signifie forcement des repas dehors, des billets de cinéma, des taxis à payer et tout cela était au-dessus de ses moyens !
Pour se consoler, il disait que les affaires du cœur ne feront que l’éloigner de son but ultime et pourrons affecter ses moyennes mais au fonds, son cœur avait tout un autre avis sur la question.
« C’est sûr ! Quand la bourse viendra, je garderais pour moi 30 ou 50 dinars, et je sortirais au moins une fois avec elle ! »
Il disait cela parce que d’habitude dés que la bourse est là il garde pour lui l’argent avec lequel il paiera le loyer du futur trimestre, il laisse pour lui-même une somme minuscule et puis il envoie tout le reste à sa famille.
Entrant dans le foyer il commençait à scruter les silhouettes espérant trouver ses camarades mais il n’a aperçu que des nouveaux visages, il y avait même de très jolies filles !
Il savait que la plupart des étudiants ont déjà eu leurs chambres et c’est justement pour éviter les bousculades qu’il est venu l’après midi !
« Je suis sûr que les gars ont réservé pour moi ! » De toute façon ça ne l’ennuyait pas du tout de se retrouver avec quelqu'un d’inconnu, ça lui permettra de connaître d’autres gens et même s’il ne s’entend pas avec ce colocataire il pourrait permuter avec un autre étudiant !
- Bonjour monsieur !
- oui bonjour …
- Je viens pour avoir une chambre.
- Tu es de la deuxième année toi !
- oui exactement …
- Et bien les étudiants de la deuxième année n’ont plus droit au foyer !
- Comment …? mais …
- On a déjà du mal à placer tous ceux qui sont à la première année !
Il était tellement sous le choque qu’il ne pouvait pratiquement plus tenir sur ses jambes, il s’apprêtait à sortir puis il est revenu, hésitant, le visage tout pâle, ne pouvant presque plus articuler.
- monsieur s’il vous plait …je n’ai pas d’argent pour louer une maison
- désolé !
- Je vous en supplie monsieur aillez pitié !
- Mais je ne peux vraiment rien faire ! … n’es tu pas boursier ?
- Si.. Mais je ne touche la bourse que dans deux ou trois mois !
- Qu’est ce que tu veux… C’est la vie !
- Je veux simplement avoir une vie comme les autres, je veux étudier avoir un boulot … je vous en supplie ! je n’ai pas les moyens de continuer mes études hors du foyer
- C’est une décision du ministère… sincèrement désolé !
Il s’est accroché aux murs pour ne pas tomber, s’est assis prés de la porte du foyer, s’est tenu la tête avec ses mains et a commencé à pleurer à chaudes larmes tout en pleurnichant :
- Tout ce que je veux c’est étudier et réussir !
écrit en 1999
4 commentaires:
Triste constat de ce qui est devenu notre système pour loger les étudiants!!Très beau texte wiss, d'autant plus qu'il illustre très bien les raisons du mouvement pour lequel les étudiants ont été détenus!!
Très touchant comme texte, De 1999 à 2010 rien n'a changé ou peut être la situation s'est encore empirée.
magnifique...
un systeme fait par une minorité qui ne s'y inscrit pas, pour une majorité qui en souffrira.Avec le temps, c'est une société "frustrée" qui se balade dans les rues de Tunis...
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